Smart News Droit Social Juin 2022
Charlotte Sicsic
Brandon ChengCollaborateurParisBrandon Cheng
Charlène FreyCollaborateurParisCharlène Frey
Karine BézilleAssociéParisKarine Bézille
Sandra HundsdörferAssociéParisSandra Hundsdörfer
Léa DebabiCollaborateurParisLéa Debabi
Sarah HaouchineCollaborateurParisSarah Haouchine
Sophie MarinierAssociéParisSophie Marinier
Nous vous proposons de retrouver régulièrement une sélection de l’actualité légale et jurisprudentielle en droit social.
ACTUALITÉ
Récapitulatif sur la nouvelle CCN de la métallurgie
Communication du Ministère du travail du 1er juin sur les obligations de l’employeur concernant la gestion des vagues de chaleur
JURISPRUDENCE
L’enjeu du bon déroulement de l’expertise dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi
Précisions sur l’indemnisation du salarié protégé ayant pris sa retraite
Rappel des règles de suppléance en cas de départ ou absence d’élus au CSE
Précisions sur les modalités d’organisation des élections
Elections professionnelles : égalité dans l’exercice du droit de vote
Licenciement pour inaptitude et obligation de consultation du CSE
ACTUALITÉ
Récapitulatif sur la nouvelle CCN de la métallurgie
Objectif de cette nouvelle CCN : un socle conventionnel unique et harmonisé pour tous les salariés de la métallurgie complété par des accords autonomes dans certains domaines avec une entrée en vigueur au 1er janvier 2024 (sauf clauses sur la protection sociale au 1er janvier 2023).
Principales nouveautés :
- une seule échelle de classement pour renouer avec la transparence et l’objectivité : un référentiel des emplois fondé sur six critères ;
- uniformisation des règles en matière de clause de non-concurrence ;
- nouveau dispositif d’aménagement du temps de travail ;
- incitation à la mobilisation des IRP dans le cadre d’un dialogue social favorisé ;
- accord autonome portant sur la qualité de vie au travail en vue d’orienter et de recommander des axes d’amélioration des conditions de travail ;
- création d’un régime de protection sociale de branche pour tous les salariés.
Nouvelle convention collective nationale de la métallurgie du 7 février 2022
Communication du Ministère du travail du 1er juin sur les obligations de l’employeur concernant la gestion des vagues de chaleur
Une fois n’est pas coutume, le ministère du travail a publié ses préconisations visant à protéger les salariés des fortes chaleurs du 1er juin au 15 septembre : adaptation de l’organisation (horaires décalés, pauses fréquentes), préférence pour le télétravail, mise à disposition d’eau potable fraîche, vérification de la compatibilité du port des protections individuelles, contrôle de l’aération et de la température de locaux, fourniture de moyens de protection et/ou de rafraîchissement, signalement des situations anormales à l’inspection du travail… Une sensibilisation des salariés est recommandée.
La vigilance doit être accrue pour les activités exposant plus intensément les salariés au risque de chaleur (BTP, travaux en extérieur, restauration, etc.).
Au titre de son obligation de sécurité, l’employeur doit informer des consignes en cas de placement de son département en vigilance rouge et procéder à une réévaluation quotidienne des risques d’exposition de ses salariés.
Pourront être mobilisés les dispositifs d’activité partielle, de récupération des heures non travaillés pour cause d’intempéries, caisse de congés intempérie du BTP.
Instruction n°DGT/CT1/2022/159 du 31 mai 2022 relative à la gestion des vagues de chaleurs en 2022 ; Communiqué de presse du Ministère du travail du 1er juin 2022
JURISPRUDENCE
L’enjeu du bon déroulement de l’expertise dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi
Lorsque le comité social et économique use de sa faculté de recourir à un expert-comptable dans le cadre d’un projet de licenciement collectif pour motif économique, l’autorité administrative doit, avant d’homologuer le plan de sauvegarde de l’emploi, contrôler les conditions dans lesquelles la mission de l’expert s’est déroulée.
En l’espèce, l’expert avait estimé que l’employeur avait manqué à son obligation de transmettre les informations sollicitées, l’empêchant de rendre un rapport.
Ainsi, en l’absence de réel contrôle par l’administration, l’homologation d’un plan de sauvegarde de l’emploi doit être annulée.
A ce titre, la Cour administrative d’appel de Versailles vient rappeler que l’absence de demande d’injonction du comité social et économique auprès de l’administration ne dispense pas cette dernière de contrôler le bon déroulement de l’expertise.
CAA Versailles, 17 mai 2022, n°22VE00604
Précisions sur l’indemnisation du salarié protégé ayant pris sa retraite
Un ancien délégué syndical bénéficiant toujours de la protection contre le licenciement est licencié, sans respect de la procédure de demande d’autorisation préalable à l’inspection du travail, par l’employeur.
Il soulève devant le Conseil de prud’hommes la nullité de son licenciement ainsi que sa réintégration mais en cours d’instance, il a fait valoir ses droits à la retraite.
Dans sa décision, la Cour de cassation, conformément à sa jurisprudence antérieure, rappelle que le départ en retraite du salarié le prive de sa possibilité d’être réintégré mais qu’il peut bénéficier de l’indemnité pour violation du statut protecteur correspondant aux salaires qu’il aurait perçu entre la date d’éviction de l’entreprise et son départ à la retraite.
S’agissant de l’indemnité pour perte d’emploi, qui a pour objet de réparer l’intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement, la Cour de cassation affirme que le salarié peut y prétendre même si la réintégration a été rendue impossible du fait d’un départ à la retraite.
Pour mémoire, cette indemnité ne peut être inférieure aux salaires des 6 derniers mois, conformément à l’article L.1235-3-1 du Code du travail.
Cass. soc., 18 mai 2022, n°21-10.118, F-B
Rappel des règles de suppléance en cas de départ ou absence d’élus au CSE
La Cour de cassation a eu l’occasion de rappeler et préciser les règles relatives à la suppléance dans une affaire où le titulaire et le suppléant d’un premier collège avaient démissionnés. A cette occasion, l’employeur a organisé des élections partielles considérant que ce premier collège n’était plus représenté. La CFDT a saisi le tribunal judiciaire afin que l’un de ses candidats non élus du second collège assure le remplacement du titulaire du premier collège.
Les règles appliquées, issues de l’article L.2314-37 du Code du travail, sont les suivantes :
- remplacement par un suppléant élu de la même catégorie présenté par la même organisation syndicale que l’élu à remplacer ou, à défaut, par un suppléant élu d’une autre catégorie appartenant au même collège présenté par la même organisation syndicale ;
- à défaut, par un suppléant élu d’un autre collège présenté par la même organisation syndicale ;
- à défaut, par un candidat non élu présenté par la même organisation syndicale.
Cette dernière précision réaffirme l’importance donnée à l’appartenance syndicale puisque la priorité est donnée à des candidats non élus d’une même appartenance syndicale vis-à-vis des candidats pourtant élus mais d’une autre appartenance syndicale.
Cass. soc., 18 mai 2022, n°21-11.347, F-B
Précisions sur les modalités d’organisation des élections
Pour mémoire, en l’absence d’accord sur les modalités d’organisation des élections professionnelles et en l’absence de saisine du tribunal judiciaire, l’employeur fixe les modalités d’organisation des élections professionnelles de manière unilatérale.
Dans le cadre d’un litige relatif à la contestation d’une décision unilatérale de l’employeur relative à l’organisation des élections professionnelles, la Cour de cassation a eu l’occasion de confirmer sa jurisprudence en rappelant qu’en l’absence de contestation devant le tribunal judiciaire de la décision unilatérale de l’employeur fixant les modalités d’organisation des élections professionnelles, le dépôt d’une liste de candidats par un syndicat vaut acceptation de ces modalités et le prive de toute action postérieure portant sur la validité de la décision et de la demande d’annulation des élections.
Cass. soc., 18 mai 2022, n°21-11.737 F-B
Elections professionnelles : égalité dans l’exercice du droit de vote
Lors des élections des membres du CSE, le vote électronique peut être mis en place par accord collectif ou par décision unilatérale afin de simplifier le processus de vote, un vote traditionnel à bulletin secret est parfois couplé avec le vote électronique ou alors ce dernier peut constituer l’unique modalité de vote.
Dans cette dernière hypothèse, il conviendra désormais d’être particulièrement vigilant dans la mesure où la Cour de cassation a rappelé que le recours au vote électronique ne permet pas de déroger aux principes généraux du droit électoral dont notamment le principe général d’égalité face à l’exercice du droit de vote.
En l’espèce, le vote électronique via un site sécurisé constituait la modalité unique de vote pour l’ensemble des salariés. Or, certains salariés du collège « Employé » ne disposaient pas d’accès à des outils informatiques ou d’une connexion internet personnelle ce qui les empêchaient de prendre part au vote. L’employeur avait d’ailleurs interdit, pour des raisons de confidentialité, l’utilisation par ces derniers des ordinateurs de la société ou d’un ordinateur personnel dans l’entreprise pour voter.
La nullité des élections a donc été prononcée au regard de l’atteinte au principe d’égalité de l’exercice du droit de vote. En cas de vote électronique, il conviendra donc de s’assurer que l’ensemble du personnel soit en mesure de voter (outil informatique et connexion internet) et, à défaut, mettre en place de terminaux dédiés au vote ou accompagner le vote électronique d’un vote à bulletin secret.
Cass. soc., 1er juin 2022, n°20-22.860, F-B
Licenciement pour inaptitude et obligation de consultation du CSE
Dans le cadre d’une procédure de licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle ou non professionnelle, les membres du CSE doivent être consultés au préalable par l’employeur sur les propositions de reclassement (article L.1226-2 et L.1226-10 du Code du travail).
En l’absence de dispositions légales, il était opportun de s’interroger sur le respect d’une telle obligation lorsque le médecin du travail fait état dans son avis d’inaptitude de l’un des deux cas légaux de dispense de recherche reclassement à savoir :
- que « tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé» ;
- ou que « l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi».
Dans son arrêt, la Cour de cassation apporte désormais une réponse claire à cette interrogation et considère que si l’un des deux cas de dispense est mentionné par le médecin du travail dans son avis d’inaptitude, l’employeur, qui n’est pas tenu de rechercher un reclassement, n’a pas l’obligation de consulter le CSE.
Cette solution est parfaitement justifiée juridiquement puisque l’objet de la consultation du CSE était précisément de formuler un avis sur le reclassement. Or, celui-ci ne pouvant être envisagé, l’employeur est légitimement délivré de son obligation de consultation. Elle permettra également aux employeurs de fluidifier leur procédure de licenciement pour inaptitude.
Cass. soc., 8 juin 2022, n°20-22.500, FS-B