Daf Mag | Covid19 et cessation de paiement : quelles sont les options ?
Daf Mag | Covid19 et cessation de paiement : quelles sont les options ?
Par Julie Cittadini, avocate associée
Dans le contexte de dégradation de la situation économique liée à la crise sanitaire, plusieurs stratégies sont ouvertes pour préserver l’entreprise et gérer avec mesure les difficultés.
Au printemps 2020, après le premier confinement, plusieurs grandes enseignes, notamment de l’habillement et de l’ameublement, ont fait part de leur entrée dans des procédures de redressement judiciaire voire de leur faillite annoncée. Pour certaines d’entre elles les difficultés préexistaient, pour d’autres, elles sont incontestablement la conséquence de la crise sanitaire.
L’équipe dirigeante confrontée à ses difficultés se doit de limiter les risques dans le cadre du meilleur scénario adapté à la poursuivre d’une activité pérenne.
1. Recours aux procédures de prévention des difficultés
Les entreprises en mesure d’anticiper un état de cessation des paiements peuvent solliciter le recours à des procédures de prévention des difficultés, à savoir la conciliation et le mandat ad hoc.
Ces procédures ont l’avantage d’être confidentielles, et permettent aux dirigeants d’être assistés d’un professionnel (le conciliateur ou le mandataire ad hoc) dans les négociations de dettes avec leurs créanciers principaux. Enfin, les accords et mesures obtenus à l’issue de ces procédures sont sécurisés juridiquement, en particulier ceux négociés dans le cadre de la conciliation, en ce qu’ils seront passés sous le contrôle d’un juge, limitant nécessairement leur remise en cause future.
Il convient pour les dirigeants d’anticiper au plus juste un éventuel état de cessation des paiements, car une fois celle-ci établie, les entreprises concernées ne pourront alors que se tourner vers des procédures collectives judiciaires, où le dirigeant se voit dans la plupart des cas totalement dépossédé de la gestion de son entreprise.
2. Recours aux passerelles » prepack cession «
Les procédures préventives présentent également l’avantage de permettre aux entreprises de définir les conditions d’un éventuel prepack cession : le dirigeant pourra, en accord avec le mandataire ad hoc ou le conciliateur, déterminer de manière confidentielle avec ses créanciers principaux, les conditions d’une cession de tout ou partie des actifs de l’entreprise, qui sera mise en oeuvre ultérieurement dans le cadre d’une procédure collective judiciaire (de redressement ou de liquidation).
En particulier, le conciliateur ou le mandataire ad hoc recherchera, pendant la durée de la procédure préventive, des candidats cessionnaires aux actifs que l’entreprise entend céder dans le cadre d’une restructuration plus globale visant à assainir la situation financière de celle-ci.
Une fois les modalités du plan de cession définies, le tribunal ouvrira, sur demande du débiteur, une procédure collective au cours de laquelle la cession envisagée sera prononcée.
Dans ce contexte, dès lors que les offres de reprise formulées par les candidats repreneurs remplissent les exigences règlementaires et légales, le tribunal sera en mesure de statuer sur celles-ci, sans recours à la procédure d’appel d’offres habituelle, accélérant ainsi significativement le processus du choix du ou des candidats repreneurs et donc de la procédure de cession dans son ensemble.
La rapidité du prepack cession offre au dirigeant la possibilité de préserver la valeur des actifs cédés, contrairement aux plans de cession classiques.
3. Recours à la formulation d’une offre de reprise à la barre par le dirigeant
En application des dispositions de l’article L.642-3 du Code de commerce, les dirigeants d’une société débitrice ont interdiction de procéder à une offre de reprise dans le cadre d’un plan de cession, sauf dérogation obtenue sur requête du ministère public.
Désormais, depuis l’ordonnance n° 2020-596 du 20 mai 2020, le dirigeant a la possibilité de se porter candidat repreneur aux actifs de sa propre société sans le verrou du ministère public. Toutefois, ce dispositif est limité dans le temps et s’applique pour les procédures en cours et jusqu’au 31 décembre 2020 inclus.
Notons que cette mesure est davantage un symbole qu’un bouleversement, dans la mesure où le Tribunal reste seul décisionnaire de la recevabilité de l’offre émise par un dirigeant et le parquet demeure présent lors des débats. Il est clair que le gouvernement avait souhaité envoyer un signal fort, toutefois ce dispositif n’a pas été repris dans le cadre de l’amendement adopté le 17 septembre dernier au projet de loi sur la simplification pour prolonger jusqu’à la fin 2021 certaines mesures mises en place lors du premier confinement.